Elles sont ces femmes qui ont bouleversé l’ordre établi en Tunisie, malgré les obstacles et les attentes de la société. Habiba Karaborni est l’une de ces perles rares qui, dès le début du XXe siècle, ont contribué à façonner une autre vision des femmes, en stimulant l’apprentissage et en défiant les stéréotypes convenus.
Une enfance marquée par l’éducation
Le début du XXème siècle en Tunisie était marqué par une éducation ignorée des femmes. Analphabètes à 99%, les tunisiennes ne savaient que peu la lecture du Coran, et seules quelques-unes étaient susceptibles de comprendre le français. Cependant, cette situation allait bientôt changer avec l’arrivée de Hallouma Bint El Fakhri, une enseignante déterminée. Ayant pris la responsabilité d’enseigner à des jeunes musulmanes, Hallouma offrait une chance à ces filles, une chance que Fatma, la fille de Habiba, a saisie avec impatience. Se cacher pour voir les leçons, Fatma trouvait dans ces enseignements un refuge qui allait orienter son parcours. Sa brillance et la qualité de ses souvenirs ont fait d’elle une fillette exceptionnelle dans l’école de Hallouma.
L’influence d’une réussite inattendue
Alors que les femmes tunisiennes n’étaient que rarement autorisées à franchir les portes de l’établissement, Fatma a réussi à les ouvrir toutes grandes. Sous l’œil bienveillant d’Hallouma, la petite Fatma a pu obtenir son certificat d’études avec brio. L’histoire de son éducation a fait grand bruit à Tunis en 1921, une femme qui se bat pour son éducation était rare. Mieux encore, elle est devenue une source d’inspiration lorsque Nacer Bey, le souverain régissant, a cité son exemple devant sa propre fille, la princesse Jenaina.
Un mariage qui n’arrête pas la passion de l’apprentissage
Malheureusement, Fatma a été contrainte de mettre fin à ses études après son mariage, choisi par son oncle. Sa passion pour l’apprentissage ne s’est cependant pas éteinte avec son mariage. Il a conduit, à la place, les bases de l’éducation de ses six enfants. Malgré son refus de réintégrer son éducation secondaire, Fatma n’a jamais cessé de prôner l’importance de l’alphabétisation et de l’autonomie financière. Le refus du remariage après la mort de son mari et le fait de travailler à la radio étaient une preuve de son audace et de sa résolution.
Un rôle pionnier dans le domaine de la santé
L’influence de Fatma ne s’est pas limitée à sa famille. En tant que l’une des assistantes de Tawhida Ben Cheikh, Fatma a joué un rôle crucial dans le lancement du planning familial en 1963, une étape importante pour le droit des femmes à disposer de leurs propres corps. Son désir pour la liberté et l’égalité l’ont poussée à prendre des mesures actives pour l’émancipation, sans attendre le droit de le faire.
La question se pose : combien de femmes comme Fatma auront traversé les épreuves et les barrières pour donner aux femmes tunisiennes l’inspiration et la motivation dont elles auront besoin pour défier l’ordre établi ?