Avec des promesses d’enrichissement grâce à l’exploitation de l’or noir, le Tchad continue de lutter contre une pauvreté omniprésente malgré d’excellentes réserves pétrolières. Alors, l’or noir tchadien est-il une aubaine réellement sous-exploitée ?
Adhésion à l’OPEP : espoirs d’évolution économique
En 2003, le Tchad rejoint les rangs de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP). Les ressources pétrolières du pays suscitent de grands espoirs pour une croissance économique significative. L’adhésion du pays à l’OPEP a été saluée comme une étape majeure vers un avenir plus prospère pour le pays d’Afrique centrale.
L’inauguration en 2004 de l’oléoduc reliant Doba, au sud du Tchad, à Kribi au Cameroun a marqué un tournant. Avec cette infrastructure, le Tchad pourrait exporter son pétrole, espérant accumuler les devises. Les dirigeants tchadiens ont promis que l’exploitation pétrolière profiterait à l’ensemble de la nation.
Le partenariat avec la Banque mondiale
La Banque mondiale était une partie intégrante du projet pétrolier au Tchad, fournissant un soutien financier et des conseils stratégiques. Selon les estimations de la banque, le pétrole rapporterait 80 millions de dollars américains par an au Tchad sur une période de 25 ans. Les revenus pétroliers, s’ils étaient bien gérés, devaient permettre de sortir le peuple tchadien de la pauvreté.
Un accord a été conclu entre la Banque mondiale et le Tchad pour gérer les revenus pétroliers. Le texte prévoyait notamment que 10 % des revenus seraient dirigés vers un Fonds pour les générations futures, afin de garantir une sécurité financière une fois les réserves de pétrole exploitées. De plus, une transparence totale était exigée dans la gestion de ces revenus.
Arrêt du soutien de la Banque mondiale
Malgré ces prévisions optimistes, l’économie tchadienne n’a pas directement bénéficié des nouvelles recettes pétrolières. Les problèmes sociaux, comme l’incapacité à payer les pensions de retraite et la fermeture des universités, ont persisté. A cela s’ajoutait une instabilité croissante, résultant des mutineries au sein de l’armée et de la menace constante d’insurrection extérieure.
Dans ce contexte, la relation entre le Tchad et ses partenaires de l’industrie pétrolière a commencé à se détériorer. En 2006, l’Etat tchadien a manifesté son mécontentement face à la manière dont les revenus pétroliers étaient gérés. En conséquence, la Banque mondiale a suspendu ses paiements et a finalement quitté l’accord pétrolier en 2008.
Le pétrole tchadien : source de revenus fluctuante
Malgré le retrait de la Banque mondiale, l’économie tchadienne restait fortement tributaire de la production de pétrole. Jusqu’en 2014, l’industrie pétrolière permettait au Tchad de connaître une période de croissance rapide avec un taux de croissance annuel moyen de 13,7 %. Cependant, la récession pétrolière de 2014 a provoqué une réduction des revenus du Tchad, entraînant le pays dans une crise économique profonde.
En 2022, le Tchad a enregistré une augmentation considérable de ses recettes pétrolières grâce à la hausse des cours du Brent. Cependant, ces revenus étaient toujours soumis aux fluctuations du dollar.
Augmentation des dépenses militaires
Alors que les recettes pétrolières augmentaient, les dépenses militaires du Tchad suivaient la même tendance. En 2018, un rapport de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique a révélé que les dépenses militaires étaient passées de 67 millions de dollars en 2005 à 670 millions de dollars en 2015, atteignant 8 % du PIB. Dans le même temps, les dépenses pour des secteurs prioritaires comme la santé restaient faibles.
Une pauvreté persistante
Malgré les ambitions initiales, la réalité du Tchad reste difficile. Le pays se classe parmi les pays les moins développés au monde, avec près de la moitié de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté. La malnutrition est élevée et les taux de scolarisation sont faibles, en particulier pour les filles. Les dépenses de santé par habitant sont aussi parmi les plus basses au monde.
Indépendamment de l’augmentation des recettes pétrolières, l’attitude du gouvernement tchadien ne semble pas avoir considérablement changé. Les syndicats ont organisé plusieurs grèves pour réclamer des ajustements salariaux en raison de l’augmentation des prix de l’essence et de l’inflation.
Il reste à voir comment le Tchad gérera ses vastes ressources pétrolières dans les années à venir. Peut-on espérer une meilleure utilisation des recettes pétrolières pour apporter des améliorations sociales significatives ? Seul l’avenir nous le dira.