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Une découverte archéologique récente sur l’île de Malte vient bouleverser les connaissances établies sur l’histoire humaine de la région méditerranéenne. Des vestiges trouvés à Latnija, un site calcaire du nord de l’île, révèlent la présence de chasseurs-cueilleurs il y a 8 500 ans, bien avant l’arrivée des premiers agriculteurs européens. Ces trouvailles, publiées dans la revue Nature, suggèrent que ces premiers habitants de Malte auraient traversé des étendues d’eau considérables, remettant en question les théories classiques sur les débuts de la navigation humaine. Cette découverte éclaire d’un jour nouveau le rôle des chasseurs-cueilleurs dans l’exploration maritime et l’occupation précoce des îles méditerranéennes.
Des navigateurs audacieux défiant les mers
La théorie dominante a longtemps suggéré que l’agriculture était le moteur des grandes migrations humaines. Selon cette perspective, la maîtrise de la culture du sol et l’établissement de sociétés sédentaires auraient été nécessaires avant de s’aventurer en mer. Cependant, les fouilles de Latnija ont renversé cette hypothèse. Les artefacts mis au jour indiquent que les chasseurs-cueilleurs étaient déjà présents à Malte bien avant l’arrivée des agriculteurs. Des outils en pierre, des foyers et des restes alimentaires variés témoignent de leur présence durable sur l’île. Parmi ces découvertes, des os de cerfs rouges, disparus depuis longtemps de l’île, ont été retrouvés.
Pour atteindre Malte, ces groupes devaient naviguer sur environ 100 kilomètres de mer ouverte sans les instruments modernes de navigation. À bord de pirogues rudimentaires, ces pionniers se guidaient grâce aux étoiles et aux courants marins. Malgré leur vitesse de déplacement limitée à environ 4 km/h, ils ont réussi à franchir ces distances considérables. L’archéologue Nicholas Vella souligne que même durant les jours les plus longs, ces navigateurs affrontaient des heures d’obscurité totale, prouvant que la mer n’était pas un obstacle mais un territoire à conquérir.
Redéfinir le rôle des derniers chasseurs-cueilleurs
Les découvertes à Latnija ne se limitent pas à une simple révision chronologique de l’histoire insulaire. Elles imposent une réévaluation des chasseurs-cueilleurs européens tardifs. Ces groupes, souvent perçus comme stationnaires et limités à des niches écologiques continentales, se révèlent être des communautés dynamiques, capables de stratégies d’adaptation et d’exploration complexes. Les archéologues décrivent un système d’organisation sophistiqué, intégrant des savoirs empiriques et des techniques maritimes avancées.
La mer, loin d’être une barrière infranchissable, était un espace actif où ces groupes pêchaient, transportaient et s’installaient temporairement. Bien qu’ils n’aient laissé ni écrits ni monuments, ces communautés ont transformé leur environnement. Leur arrivée pourrait même avoir contribué à l’extinction de certaines espèces endémiques par une chasse intensive ou des perturbations écologiques indirectes. Selon Eleanor Scerri, ces résultats allongent d’un millénaire la préhistoire maltaise et réévaluent les capacités maritimes des derniers chasseurs-cueilleurs d’Europe.
Une complexité culturelle souvent sous-estimée
Les chasseurs-cueilleurs de Malte défient les stéréotypes de communautés technologiquement arriérées. Ces groupes possédaient une culture et une cognition bien plus sophistiquées que ce que l’absence d’écriture pouvait laisser croire. Les traces qu’ils ont laissées ne sont pas monumentales mais significatives : foyers, ossements et outils façonnés témoignent de leur passage. Ces vestiges, bien que modestes, permettent aujourd’hui de mieux comprendre leur mode de vie et leur capacité à dominer des environnements variés.
En repoussant les frontières de leur monde connu sans cartes ni instruments, ces navigateurs démontrent une expertise maritime impressionnante. Les témoignages matériels retrouvés à Latnija ne sont que des fragments, mais ils suffisent à réévaluer la place de ces communautés dans l’histoire de la Méditerranée. Ils nous rappellent que même les sociétés sans écriture ont une histoire à raconter, et que cette histoire mérite d’être entendue et explorée.
Les implications pour la préhistoire méditerranéenne
Cette découverte à Latnija pourrait bien transformer notre compréhension de la préhistoire méditerranéenne. Elle suggère non seulement une occupation humaine antérieure et étendue des îles, mais aussi une complexité sociale et technologique sous-estimée des chasseurs-cueilleurs. Ces révélations soulignent la nécessité de réévaluer les capacités d’adaptation et d’exploration des premières communautés humaines. Les implications de ces découvertes sont vastes, affectant à la fois les récits historiques et les théories sur la diffusion des cultures en Méditerranée.
Les chercheurs s’interrogent désormais sur l’impact écologique et culturel qu’a eu cette présence humaine précoce. Comment ces premières navigations ont-elles influencé l’évolution des sociétés méditerranéennes ? Quel rôle ont joué ces pionniers dans la transformation de leur environnement ? Ces questions ouvrent de nouvelles perspectives pour l’étude de l’histoire ancienne. Quelle sera la prochaine découverte qui viendra enrichir notre compréhension de ces périodes lointaines ?
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Incroyable ! Ça remet vraiment en question tout ce qu’on savait sur l’histoire de la Méditerranée.
Comment ont-ils pu naviguer sans voile ni boussole ? 😮