La pandémie de Covid-19 a mis à mal la création et les artistes africains. Après un an de crise, certains mécanismes d’entraide se multiplient pour aider la culture et les artistes. Si certains émanent des artistes eux-mêmes, d’autres prennent la forme d’appels à projets, à l’image d’ellipse art projects ou du fonds international pour la diversité culturelle. Un soutien d’autant plus bienvenu que la culture sera essentielle à la reprise.
En Afrique, la culture essentielle mais fragilisée
Pas de développement sans culture : voilà ce que concluait l’Assemblée générale des Nations Unies en 2015, à l’occasion de l’adoption de l’Agenda 2030 pour le développement durable. 6 ans après, à l’occasion du G20 accueilli par l’Italie, la culture vient d’être reconnue essentielle à la reprise post-Covid. Dario Franceschi, ministre italien de la Culture, voit en elle “un instrument de croissance économique durable”. Mais s’il est acquis que la culture jouera un rôle pour sortir de la pandémie, elle n’a pas été épargnée non plus par la crise sanitaire. En Afrique, continent particulièrement touché par la deuxième vague, la culture et les artistes ont particulièrement souffert. Fihr Kettani, secrétaire général de la Fondation pour le développement de la culture contemporaine africaine (FDCCA), témoigne : “la crise sanitaire mondiale liée au Covid-19 a brusquement stoppé la grande majorité des manifestations culturelles et artistiques du continent africain. Ces annulations massives ont eu des conséquences néfastes liées aux crises économiques engendrées par la pandémie dans nos pays.”
En septembre 2020, au Sénégal, des artistes réunis au sein d’un collectif ont dénoncé “la lente agonie” du monde des arts. Les aides du gouvernement, estimées à 1,60 euros par jour et par travailleurs du spectacle vivant, n’ont pas suffi à apaiser la colère des artistes. Ce n’est pas un hasard si le Prix ellipse consacre sa première édition au Sénégal. Cette initiative du fonds de dotation ellipse art projects vise à inciter et accompagner le développement culturel des pays dans lesquels la société de conception et de réalisation d’infrastructure Ellipse Projects intervient. Souleymane Bachir Diagne, philosophe sénégalais qui dirige l’Institut d’études africaines de l’université Columbia à New-York rappelle que “la culture de l’échange avec les artistes, ce pilier indispensable entre le public et les œuvres, est réduit à néant depuis cette période de pandémie de coronavirus.”
Enchères solidaires
Dans cette situation difficile, les artistes s’organisent. Les initiatives solidaires se multiplient, à l’image de la vente caritative “Africa Unite !” fin 2020. Cette vente aux enchères organisée par la FDCCA et le Fonds africain pour la culture (ACF) a été rendue possible par les dons d’oeuvres d’artistes. Le principe est de “faire participer les artistes en offrant des œuvres, et en les revendant au profit d’une organisation qui finance des projets culturels par des appels à projets”, détaille Fihr Kettani. Pour Abdoulaye Konaté, artiste plasticien malien, cette initiative est importante “car on ne sait pas combien la situation de la culture est actuellement réduite à une peau de chagrin. C’est un domaine peu soutenu par les État africains, aussi, nous devons être solidaires, car certains artistes sont en réelle souffrance. Nous lançons un appel aux collectionneurs et aux mécènes afin de favoriser la création africaine.”
Prix Ellipse, Fonds international pour la diversité culturelle : des appels à candidature pour soutenir culture et développement
Du côté des événements artistiques, on s’organise pour faciliter les échanges malgré les difficultés. La date limite de soumission des dossiers à la treizième édition de la Biennale africaine de la photographie, “Les rencontres de Bamako”, est fixée pour le 13 mai prochain. Le comité d’organisation a mis en place des initiatives d’aides aux artistes qui seront sélectionnés : “Nous travaillerons avec les artistes invités pour faciliter leur voyage et/ou la présentation de leur travail à distance. Leurs billets d’avion, frais de visa et tests PCR ainsi que leur hébergement sont pris en charge par l’organisation de la Biennale ».
Autre appel à projet, le Prix Ellipse vise à soutenir la scène artistique émergente. Pour sa première édition consacrée au Sénégal, cette initiative du fonds de dotation ellipse art projects sélectionnera un artiste résidant au Sénégal. L’idée est de faciliter l’accès du lauréat aux réseaux internationaux en lui proposant une résidence de trois mois à la Cité internationale des arts et une exposition de ses œuvres à Paris. Au-delà de la mise en avant de la création artistique, l’objectif est aussi d’insister sur les liens existants entre culture et développement. A l’initiative d’ellipse art projects, la société française de réalisation d’infrastructures Ellipse Projects espère participer au développement culturel des pays où elle intervient.
Une approche encouragée par le Fonds international pour la diversité culturelle, qui organise lui aussi un appel à candidatures. Ce fonds bénévol multi-donateurs, créé en 2005 à l’initiative de l’Unesco entend “soutenir et investir dans la culture et la créativité en tant que moteurs du développement durables”. A la différence du prix Ellipse, il s’adresse notamment aux institutions publiques et ONG éligibles, et a pour objectif de sélectionner des projets à impact direct sur la création. Des initiatives qui “ont contribué à l’émergence de systèmes durables de gouvernance culturelle, notamment en créant un environnement propice pour les entrepreneurs culturels, l’accès à de nouveaux marchés pour les biens et services culturels et l’accès à diverses expressions culturelles”, précise le FIDC.
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